Il y a quelques mois se faisait élire le plus jeune président de la cinquième République. Mais derrière sa jeunesse et son sourire s’exprime un vieux régime, violemment réactionnaire et déterminé à ne rien céder, bien au contraire. La promesse qui nous est faite est celle d’un darwinisme social et une question raciale chauffée à blanc.
Les lois islamophobes passées sous la droite et la gauche, à la grande satisfaction de l’extrême droite, ont été pérennisées. Tout comme l’Etat policier a été légitimé avec l’Etat d’urgence permanent. Les débats identitaires ont rendu inaudible la résistance au néolibéralisme, et la population dans son ensemble va payer cher – très cher – d’avoir joué le jeu de la division prôné par les élites.
Toutes ces lois identitaires et sécuritaires, passées sur le dos des citoyens de confession musulmane et acceptées par l’opinion publique, elle-même gangrenée par le racisme conscient ou inconscient, vont maintenant se retourner contre tout le monde parce que tout le monde a été beaucoup trop lâche pour dire “NON ! On ne joue pas avec les principes”. Et quand on n’a plus de principe, on n’a plus rien pour tenir debout.
Emmanuel Macron – élu avec moins de 44% des inscrits – et sa majorité – avec moins de 16% – compenseront ce manque de légitimité par plus d’autoritarisme, de mépris et de violence. Il suffit de lire la presse pour se rendre compte que cet inconnu de tous il y a encore trois ans se comporte déjà comme un monarque absolu grâce à la démission de la masse et à la dévotion des élites.
Depuis bien longtemps, les décideurs politiques se sont soustraits à la souveraineté populaire pour mieux se soumettre aux décideurs économiques. Mais que ce président minoritaire s’engage dans la même politique que Donald Trump devrait nous inquiéter au plus haut point et nous faire descendre dans la rue.
Le temps joue contre nous et chacun sait que la situation est intenable.
Je me projette dans un futur raisonnablement proche pour voir la cinquième République s’effondrer. Mais par quoi sera-t-elle remplacée ? Une nouvelle république coloniale, qui continuera de se voir comme exclusivement blanche et islamophobe ? Ou bien une république qui s’assume telle qu’elle est réellement, et met ses décideurs au service de ceux qui les élisent.
On ne vit qu’une fois et on n’a qu’une seule chance de mener son combat. On ne vit qu’une seule fois pour choisir entre vivre comme un lâche ou vivre pour ne rien lâcher. Alors soit on se donne tous les moyens pour faire aboutir nos luttes, soit on attend que le groupe dominant change d’avis et dans ce cas, nous attendrons encore longtemps, très longtemps.
J’en profite ici pour lancer un message à ceux qui pensent détenir le monopole des luttes sociales : tant que vous ne prendrez pas au sérieux la question raciale, vous continuerez à être inaudibles derrière les questions d’identité nationale. Vous le savez tous, la convergence des luttes ne se fera pas sans les populations racisées et les quartiers populaires.
Je tiens aussi, ici, à exprimer mon soutien à la Palestine et à son irréductible peuple qui refuse de se soumettre, qui continue de résister face aux bombes, aux balles, aux gaz lacrymogènes de l’occupant sioniste et surtout, qui résiste à la lâcheté de la communauté internationale.
Benyamin Netanyahu et ses sbires en France pourront continuer de rêver du grand Israël sur le dos de la Palestine. Mais ce rêve butera encore et toujours sur le cauchemar de la résistance. Les mots m’échappent pour exprimer mon soutien à tous les peuples qui refusent d’être dominés par un autre. Les mots m’échappent mais je les retrouve chez Mahmoud Darwich, paix à son âme :
“Inscris !
En tête du premier feuillet
Que je n’ai pas de haine pour les hommes
Que je n’assaille personne mais que
Si j’ai faim
Je mange la chair de mon
Usurpateur
Gare ! Gare ! Gare
!
À ma fureur !”