Sur l’île de Djerba en Tunisie, des habitants noirs ont pris l’habitude  d’enterrer leurs morts dans un bout de terrain mal entretenu appelé le « Cimetière des esclaves ». A côté, deux autres cimetières sont destinés aux « ahrar », les hommes libres, plus clairs de peau. 

« Cette situation existe depuis toujours, nous nous y sommes habitués. Les sépultures des esclaves et celles des libres sont séparées. Chacun a son coin », explique Nadia Borji, une habitante. 

Mais « nous savons que c’est anormal de subir cette discrimination », confie la femme de 46 ans à l’AFP. 

Le pire, c’est que ce cimetière se trouve près d’une mosquée où les prêches appellent à l’égalité et au respect », ajoute Dorra Douiri, une autre femme. 

Contrairement aux grandes villes comme Tunis et Sfax, les habitants de Djerba enterrent leurs morts sans autorisation municipale, ce qui leur laisse la possibilité de répartir les lieux de sépulture selon les familles ou le niveau social, voire la couleur de peau. 

Mais cette pratique cause problème, surtout depuis une nouvelle loi contre le racisme, passée le 9 octobre dernier. Le Parlement tunisien a en effet adopté une loi jugée historique, qui pénalise les propos racistes, l’incitation à la haine et les discriminations. Ces actes sont désormais passibles de trois ans de prison et de 5.000 euros d’amende.

Cependant, les militants savent que « le vrai travail commence maintenant », comme en témoigne  Saadia Mosbah, présidente de l’association de défense des minorités M’nemty. Pour elle, le fléau du racisme est « bien ancré dans la mentalité de nombreux de Tunisiens ».

De plus, les mairies de Djerba mentionnent encore sur les extraits de naissance des descendants d’esclaves le mot «atig» (affranchi par) suivi du nom de la famille ayant affranchi leur aïeul. L’Etat n’aurait toujours pas ordonné aux mairies de l’abolir.