« Nessma TV s’est transformée en un organe de propagande et de manipulation. » La Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (HAICA), le CSA tunisien, indiquait en janvier dernier que la chaîne privée diffusait sans autorisation légale. La HAICA dénonçait également « les violations commises par la chaine TV à l’encontre des enfants, femmes et personnes âgées en exploitant leur situation de pauvreté et de précarité et en les mettant en spectacle de manière humiliante. »

Trois mois plus tard, la HAICA a décidé de faire appliquer la décision de fermer la chaîne de télévision privée. Nabil Karoui, le patron de Nessma, peste : « Sous le gouvernement de Youssef Chahed (le Premier ministre tunisien, ndlr), il n’y a plus de liberté d’expression ni de démocratie », affirme-t-il. Cette fermeture de sa chaîne est, une fois encore, l’occasion pour Nabil Karoui de faire ce qu’il a toujours fait : de la politique. A propos du parti du chef du gouvernement, l’homme d’affaires affirme : « À peine a-t-il commencé à se former qu’il ferme déjà les télévisions qui ne lui sont pas affiliés. »

Nabil Karoui a toujours touché autant aux affaires qu’à la politique. C’est sous son impulsion que le parti du président actuel, Nidaa Tounès, a été lancé. C’est sous son impulsion également que cette formation s’est petit à petit rapprochée du parti islamiste Ennahadha. Et toucher à la politique a permis à Nabil Karoui de pouvoir contourner la loi cinq ans durant. Nessma TV aura été l’organe de propagande de Nidaa Tounès et ce parti lui a bien rendu en évitant à la chaîne privée d’avoir à se conformer au cahier des charges que lui impose la HAICA depuis 2014.

Et en bon politique, Karoui tire sur la corde sensible pour se victimiser : Cet arrêt, explique le patron de Nessma, met par la même occasion fin aux activités de l’Association Khalil Tounes ; qui « devait distribuer 100 000 repas aux familles dans le besoin durant le ramadan. » S’il a contourné les lois pendant cinq ans, Nabil Karoui justifie la décision de la HAICA par un acharnement politique. Le patron montre surtout, lui qui veut gérer le pays, qu’il n’ajouterait que du désordre au désordre ambiant en cas d’arrivée au pouvoir.