A l’origine de l’appel, le futur « système universel » de retraites par points, censé remplacer les 42 régimes existants (fonctionnaires, privés, régimes spéciaux, complémentaires). L’exécutif promet un système « plus lisible » et « plus juste », en réalité il s’agit de la précarisation des retraités.
« Il faut miser sur un bon gros coup », a estimé cette semaine Yves Veyrier, secrétaire général du syndicat FO.
Message reçu dans les transports, avec 90% des TGV et 80% des trains régionaux annulés jeudi, et 10 lignes sur 14 du métro parisien fermées. Des grèves illimitées sont prévues à la RATP et à la SNCF où on s’attend déjà à un mouvement dans la durée.
Les transports de grandes agglomérations comme Strasbourg, Bordeaux, Marseille, Nantes ou Lille devaient également être massivement perturbés.
Dans l’enseignement, 70% des enseignants du primaire se sont déclarés en grève, et les taux dans le secondaire devraient être voisins, de source syndicale.
Anticipant un mouvement long dans un contexte social tendu où les mécontentements se multiplient (hôpital, police, pompiers, enseignants, cheminots, « gilets jaunes »…), l’exécutif maintient le cap. « Je n’y renoncerai pas », a affirmé le chef de l’État Emmanuel Macron.
Les Français ont à l’esprit le mouvement social de 1995 contre une précédente réforme des retraites et de la Sécurité sociale qui avait paralysé le pays pendant trois semaines et contraint le gouvernement d’alors à reculer.
Plusieurs sondages ont montré que si les Français sont favorables à une réforme des retraites, une majorité soutient également la grève, dans un pays qui sort à peine de la fronde sociale des « gilets jaunes » fin 2018 et début 2019.
– « Grande victoire » –
Policiers, éboueurs, avocats, retraités ou transporteurs routiers – qui planifient des opérations escargots – appellent aussi à des actions.
De même que des « gilets jaunes », l’ensemble des partis de gauche mais aussi le Rassemblement national à l’extrême droite. Et 180 intellectuels, comme l’économiste Thomas Piketty et l’actrice Ariane Ascaride, sont montés au créneau pour dénoncer les « offensives d’un gouvernement néolibéral et autoritaire ».
Le projet précis de réforme ne sera dévoilé que mi-décembre pour un passage au Parlement début 2020.
Le gouvernement a laissé la semaine dernière une porte ouverte à une entrée en vigueur après 2025, ainsi qu’à des points chers aux syndicats, comme la prise en compte de la pénibilité au travail ou des « garanties » attendues par les enseignants, dont près de sept sur 10 seront en grève.
Lundi, pour les rassurer, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire s’est prononcé pour une revalorisation de leur salaire.
Côté syndical, la suite du mouvement est déjà à l’ordre du jour, avec des assemblées générales en fin de journée dans les entreprises ou administrations, et une réunion vendredi matin de plusieurs syndicats et d’organisations lycéennes.
Les syndicats jouent gros. Ils n’ont pas obtenu de recul sur une réforme d’ampleur depuis 2006, avec le Contrat première embauche.
« On n’a pas eu de grande victoire depuis 1995 », relève Laurent Brun, patron de la CGT-Cheminots.
Le ministère de l’Intérieur s’attend à la présence à Paris de « quelques centaines » de « black blocs » et « gilets jaunes radicaux », et « quelques milliers » dans tout le pays, une situation quasi habituelle depuis la loi travail de 2016. La préfecture de police a mobilisé près de 6.000 policiers et gendarmes.