Quarante ans après les massacres de Sabra et Chatila, dans des camps de réfugiés palestiniens au Liban, la responsabilité d’Israël est de plus en plus avérée. Mais justice n’a jamais été rendue.
Le 16 septembre est l’occasion de souvenir d’un événement dramatique. Et plus particulièrement cette année. Car cela fait 40 ans jour pour jour qu’ont débuté les massacres de Sabra et Chatila. Des exactions qui ont perduré jusqu’au 18 septembre 1982.
Le bilan est terrible : 460 morts pour ce qui est des versions plus ou moins officielles. 3 500 selon d’autres sources — 800 selon l’armée israélienne. Un carnage qui a touché des Palestiniens, civils, mais surtout des femmes et des enfants.
Les camps de Sabra et de Chatila, au Liban, accueillent des réfugiés palestiniens. Dans ces camps du sud de Beyrouth, des derniers combattants de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) et des soldats d’une force multinationale, composée d’Américains, de Français et d’Italiens, veillaient sur les réfugiés. Après leur départ, on retrouve des cadavres d’enfants, de femmes et d’hommes.
Mutilations et actes de torture
Mais les massacres des camps de Sabra et de Chatila ne sont pas de « simples » tueries : les cadavres sont retrouvés avec poings et chevilles liés. Selon plusieurs témoignages, les réfugiés ont été surpris dans leur sommeil et plusieurs corps sont retrouvés vêtus d’un pyjama. Des actes de torture ont eu lieu, des mutilations…
A l’époque, alors que les journalistes constatent le massacre. Ils accusent rapidement l’armée israélienne d’avoir perpétré ces actes terribles. Israël rétorque que ce sont les Forces libanaises, le parti des phalanges-Kataëb et les milices du commandant dissident de l’armée libanaise Saad Haddad qui en sont à l’origine.
Une commission d’enquête sur les événements est lancée par Israël. Le président de la Cour suprême israélienne, Yitzhak Kahane, va diriger pendant plusieurs mois cette enquête pour assurer qu’Israël est responsable, mais pas coupable : ce sont en effet, indique la Cour, les milices chrétiennes qui ont massacré.
Ariel Sharon, plus coupable qu’il n’y paraît ?
Mais le ministre de la Défense de l’époque, Ariel Sharon, aurait permis ce massacre. Le gouvernement israélien est accusé d’avoir trop peu agi. Depuis 40 ans, plusieurs enquêtes ont également pointé l’inaction des États-Unis.
Mais selon Ronen Bergman, journaliste israélien qui a publié une enquête en juin dernier, Israël aurait modifié la version des faits pour que les forces israéliennes puissent rester à Beyrouth. Lors d’une réunion en juillet 1982, Ariel Sharon avait demandé d’« anéantir la partie sud de Beyrouth », contrairement à ce qui a toujours été affirmé.
La responsabilité d’Israël était déjà prouvée. Sa culpabilité pourrait également l’être. Mais l’État hébreu a toujours envoyé un message équivoque à la communauté internationale, en gardant des dirigeants à leurs postes respectifs. Même Sharon, viré de la Défense, avait conservé un statut de ministre.
En quarante ans, on aura donc appris des choses sur ce terrible épisode. Cela semble loin d’être fini. Mais il pourrait bien n’y avoir jamais aucune justice prononcée contre les auteurs des actes ou les responsables. Car une loi d’amnistie, décidée trois ans plus tard par les Libanais, interdit les poursuites pour d’éventuels crimes commis pendant la guerre civile.