Viendra, viendra pas? A la suite d’un appel du président américain Donald Trump, Israël avait annoncé jeudi avoir interdit la visite de Mme Tlaib et d’une autre élue américaine Ilhan Omar en raison de leur soutien au mouvement de boycott.

Mais dans la nuit, Rashida Tlaib a écrit aux autorités israéliennes pour leur demander de pouvoir rendre visite à sa famille, et plus particulièrement sa grand-mère, qui vit dans le village de Beit Ur al-Fauqa, près de Ramallah, en Cisjordanie occupée.

« Il pourrait s’agir de ma dernière chance de pouvoir lui rendre visite », a fait valoir l’élue américaine dans sa lettre mise en ligne. « Je m’engage à respecter toutes les restrictions et à ne pas faire la promotion du boycott d’Israël durant ma visite », poursuit le court texte en anglais.

Vendredi, le ministre israélien de l’Intérieur Arié Dery a accédé à cette demande « pour une visite humanitaire à sa grande-mère », Muftia. Rashida Tlaib a aussi « promis de ne pas promouvoir la cause du boycott contre Israël durant son séjour », a souligné le ministre, sans toutefois détailler les conditions imposées à l’élue américaine, née à Detroit de parents originaires de Cisjordanie.

Adieu figues

Mais dans un énième retournement de situation, l’élue américaine a finalement refusé l’offre des autorités israéliennes.

« J’ai décidé que rendre visite à ma grand-mère sous ces conditions oppressives allait à l’encontre de tout ce en quoi je croyais: combattre le racisme, l’oppression et l’injustice », a tweeté Rashida Tlaib, qui siège à la Chambre des représentants depuis janvier 2019.

« Lorsque j’ai gagné, cela a donné aux Palestiniens l’espoir que quelqu’un dirait enfin la vérité sur les conditions inhumaines. Je ne peux pas permettre à l’Etat d’Israël d’éteindre cette flamme en m’humiliant et d’utiliser mon amour pour ma mamie afin de me soumettre à leurs politiques oppressives et racistes », écrit-elle.

Dans le village familial de Rashida Tlaib, sa grand-mère Muftia l’attendait. « Je la vois arriver au village en tenue traditionnelle », a-t-elle confié à l’AFP, impatiente de « sacrifier un mouton » pour ses retrouvailles avec sa petite-fille.

L’Etat hébreu « a agi de façon appropriée » et s’est montré « très respectueux et correct » envers Mme Tlaib, a tweeté vendredi soir Donald Trump, accusant l’élue démocrate d’avoir « odieusement » refermé la porte ouverte par Israël.

« La seule gagnante dans tout cela est la grand-mère de Tlaib. Elle n’est plus obligée de la voir désormais! », s’est également moqué le président américain.

« Ennemies »

Si les Etats-Unis sont un allié historique d’Israël, Rashida Tlaib, et sa comparse Ilhan Omar, sont considérées par plusieurs comme des « ennemies » de l’Etat hébreu, car militant pour la campagne BDS qui prône le boycott d’Israël.

Or, depuis 2017, une loi israélienne permet aux autorités d’interdire l’entrée aux partisans du mouvement BDS qui appelle au boycott économique, culturel ou scientifique d’Israël afin de protester contre l’occupation des Territoires palestiniens.

Si la colonisation par Israël de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est annexée s’est poursuivie sous tous les gouvernements israéliens depuis 1967, elle s’est accélérée ces dernières années sous l’impulsion du Premier ministre Benjamin Netanyahu et de son allié à Washington, Donald Trump.

Le refus initial par Israël d’autoriser Mme Tlaib et Mme Omar, des adversaires politiques de M. Trump, à entrer sur son territoire a suscité des réactions d’indignation côté palestinien et soulevé aussi côté israélien un débat sur la proximité entre Donald Trump et Benjamin Netanyahu.

Vendredi après-midi, des militants palestiniens priaient Rashida Tlaib sur les réseaux sociaux d’éviter de rendre visite à sa grand-mère en raison des restrictions imposées par l’Etat hébreu, notamment le silence sur la campagne BDS.

Très critique de Rashida Tlaib et de son soutien à la campagne de boycott d’Israël, une partie de la presse israélienne a néanmoins reproché à Benjamin Netanyahu, en campagne pour les législatives du 17 septembre, d’avoir cédé au chant des sirènes de Donald Trump.

« Après de nombreux zigzags entre ce qui est bon pour Israël et ce qui est bon pour Trump, Netanyahu a choisi Trump », notait l’analyste Shimrit Meir dans les pages du quotidien Yediot Aharonot, plus grand tirage de la presse israélienne.