« Maintenant que le président Trump est en poste au sud de la frontière, les choses ont changé. Nous ne tolérerons plus votre comportement. » Voilà le message laissé par un groupe baptisé Conseil des citoyens conservateurs du Canada qui, un mois jour pour jour après l’attentat qui a visé une mosquée de Québec, s’en prend directement aux étudiants musulmans de l’université Concordia de Montréal. Dans un email, ce groupuscule indique que des bombes ont été posées dans l’établissement et que celles-ci « ne sont pas destinées à tuer des gens » mais ont pour « but principal » de « blesser des étudiants musulmans. » Hier, aucune bombe n’a été trouvée sur les lieux, mais trois pavillons de l’université ont dû être évacués.

« C’est une situation choquante et aberrante », déplore Stephen Brown, porte-parole de l’Association des étudiants musulmans (MSA) de l’université Concordia, une association qui avait organisé, justement, une semaine de « sensibilisation à l’Islam. » Les auteurs de l’alerte à la bombe expliquent leurs menaces par le fait que « des étudiants musulmans et leurs invités (ont) utilisé les toilettes publiques au 7e étage pour se laver les pieds dans l’évier de la salle de bain. » L’université ne dispose pas de salle d’eau pour la prière, les étudiants musulmans utilisent donc les toilettes publiques pour les ablutions. Cela mérite-t-il pour autant de telles menaces ? La ministre responsable de l’Enseignement supérieur, Hélène David, les a en tout cas dénoncée, l’université Concordia étant réputée pour être « très accueillante et très inclusive. »

Cette scène arrive alors que, à Ottawa, les députés discutent actuellement d’une motion qui doit permettre de lutter contre l’islamophobie. Une motion qui risque bien d’être jetée à la poubelle tant les opposants à cette dernière sont nombreux. Jérôme Blanchet-Gravel, auteur du livre « Le retour du bon sauvage », assure par exemple que « bannir l’islamophobie serait inutile », estimant que cela « nuirait grandement aux grands débats d’idées essentiels à la démocratie. » Selon lui, punir l’islamophobie rendrait « subversive la critique de l’Islam, au point d’en faire quelque chose de ‘cool’, voire d’excitant. » De nombreux députés d’Ottawa estiment que cela serait « un premier pas vers la restriction de notre droit de critiquer l’Islam » et instaurerait « un climat de terreur et de haine. » Les menaces reçues par les musulmans de l’université Concordia changeront-elles la donne ? Pas sûr.