Un troupeau de chèvres et de moutons au milieu des HLM à Bagnolet, un pêcheur de carpes à Neuilly-sur-Marne, la plus grande librairie de livres anciens et d’occasions parmi les puces de Saint Ouen…

Dans « Mon incroyable 93 », Wael Sghaier, ancien étudiant en tourisme, nous fait voyager dans son département en y donnant ses bonnes adresses, ses coups de coeur.

Un film documentaire qui fait du bien, à contre-courant des images de violences, de drogue et du ‘danger de l’islamisme’, trop souvent véhiculés dans les reportages ou enquêtes sur la Seine-Saint-Denis. 

« L’inspiration pour ce documentaire me vient de mon enfance passée à Aulnay-Sous-Bois. J’entendais des choses dans les médias sur les gens avec qui je grandissait mais moi je ne voyais pas ça. Je les considérais comme des super héros », explique Wael Sghaeir, qui a tenu d’abord un blog sur son département.

En 2014, il part en effet explorer les 40 villes du territoire. Il écrit alors des articles sur les bons plans du 93, qu’il publie dans un blog pour le comité départemental du tourisme.

« J’avais envie d’avoir les arguments pour défendre mon territoire, ma ville. Je voulais mieux connaître là où j’ai grandi », confie le jeune aulnaysien.

Puis il décide de réaliser un documentaire filmé tiré de ses expériences, et reprend alors son périple en juillet 2016.

« Quand j’ai dit que je voulais partir en voyage en Seine-Saint-Denis pour en faire mon stage de fin d’études, tout le monde m’a ri au nez. On me prenait pour un fou », raconte t-il.

Mais Wael Sghaier, déterminé et adepte d’un tourisme de proximité, s’en va alors avec un sac à dos et une caméra à la main.

Pendant tout l’été, il part à la rencontre des habitants qui lui offrent une tente, un toit, l’invitent à manger, lui font découvrir la ville.

On y fait notamment la rencontre de 2spee Gonzales, un rappeur qui a vendu plus de 10 000 albums en chantant sur la ligne 13 du métro, d’un apiculteur à Aulnay, de The Blankok Brothers, un groupe de rock dans un garage du Blanc-Mesnil, mais aussi de simples habitants qui mettent en valeur et aiment leur territoire.

« On ne voit pas souvent Wael dans le documentaire car il n’avait pas envie d’être vu, d’être mis en avant et c’est honorable. Il ne voulait pas faire ressortir un visage mais le visage de la Seine-Saint-Denis en faisant parler les gens », souligne le producteur Nabil Habassi, fondateur de l’agence de productions audiovisuelles 60sfilmz et originaire de Stains.

Mon incroyable 93 « certifié conforme à la réalité », comme il est écrit en sous-titre, est donc une succession de belles rencontres, plein d’humanité, relayant les initiatives citoyennes.

« Le tourisme ce n’est pas que des selfies ! Quand on part à la découverte d’un territoire, il faut montrer ce qu’il se passe autour de nous. Je ne veux pas que mon documentaire amène des cars de touristes japonais, ce n’est pas l’idée, mais simplement qu’il fasse réfléchir. Dans chaque lieu touristique il y a un patrimoine. Souvent on parle des pierres, de ce qui reste, de ce qui date de mille ans. Mais ce que j’ai pu découvrir en Seine-Saint-Denis c’est que le patrimoine c’est d’abord et avant tout les gens qui y vivent », insiste Wael Sghaier.

Aux critiques sur une vision un peu idéaliste de la Seine-Saint-Denis où les difficultés seraient mis sous silence, le jeune réalisateur rappelle que le 93 est « un territoire normal, comme les autres ». « Il y a des problèmes partout. A Neuilly-sur-Seine il y a des problèmes, sauf qu’on ne les voit pas », fait-il remarquer.

Désormais, « Mon incroyable 93 » sillonnera lui aussi le département. Le documentaire déjà diffusé à Stains, Aubervillers, Saint-Ouen, le Blanc-Mesnil, sera aussi présent dans vingtaine de salles ailleurs en France.

Les prochaines projections et rencontres, annoncées sur la page Facebook du projet, sont prévues le 10 février à les Pavillons-sous-Bois, et le 19 février à Bagnolet.