Dans son cinquième rapport annuel, l’Observatoire de la laïcité tire à boulets rouges sur les discours qui demandent un « durcissement » de la laïcité. Des discours « contre-productifs », estime Jean-Louis Bianco, cité par La Croix. Le rapport, remis au président Macron il y a deux jours, montre la différence qui existe entre les discours et la réalité du terrain. Les atteintes à la laïcité, explique le président de l’Observatoire, « restent en réalité peu répandues au niveau national. »

Certes, admet-il, il y a « une sensibilité toujours très forte sur toute situation qui touche à la laïcité et aux faits religieux. » Mais Jean-Louis Bianco remarque qu’il y a beaucoup de « confusions entre ce qui relève de la laïcité et ce qui relève d’autres champs. » Une laïcité dont le principe est souvent « invoqué à tort. » Le président de l’Observatoire déplore d’ailleurs les « effets contre-productifs produits par des discours publics, dans un contexte de peurs multiples, visant à imposer un ‘durcissement’ de la laïcité et à ‘multiplier les interdits.’ »

« La laïcité, ce n’est pas la mise en accusation, directement ou indirectement, d’une communauté de croyants »

« Les tensions et les crispations sur ces sujets qui suscitent un émoi important, restent très significatives », indique le rapport de l’Observatoire, qui assure qu’il « est plus nécessaire que jamais de dresser l’état des lieux de la laïcité avec une grande rigueur d’analyse. » « Dans le débat public, il faut sur la question laïque savoir rester objectif, garder la tête froide et ne pas céder à la surenchère », peut-on lire dans la synthèse du rapport.

Surtout, l’Observatoire de la laïcité donne la parole à des responsables religieux inquiets. Le président de la conférence épiscopale de l’Eglise catholique, Mgr Georges Pontier, s’inquiète : « Nous ressentons vraiment l’impression d’une volonté de réduire l’expression religieuse à l’intime des personnes et à la faire disparaître de l’espace public. »

Pour Ahmet Ogras, président du CFCM, « la pratique de la laïcité aujourd’hui est pour nous notamment liée à la lutte contre les actes antimusulmans. » Le patron du Conseil français du culte musulman assure qu’il partage « avec le Président le constat d’une ‘radicalisation’ de la laïcité. » Mais le CFCM s’étonne surtout d’un point : « Les personnes qui légifèrent et parlent sans cesse de laïcité et de ses sujets connexes ne sont pas toujours compétents pour le faire », indique Ahmet Ogras. Et ce dernier de pointer les « laïcards » islamophobes : « Nous avons besoin que la laïcité ne soit pas un ‘laïcisme’, explique le président du CFCM. Surtout, il ne faut pas mélanger les priorités. La laïcité c’est le vivre-ensemble, en se respectant. Ce n’est pas la mise en accusation, directement ou indirectement, d’une communauté de croyants. »