Les influenceurs musulmans ou mettant en scène leur façon de pratiquer l’islam pullulent sur les réseaux sociaux. Mais l’envers du décor n’est pas reluisant…
Ils s’appellent Dylan Thiry, Jazz Correia ou Milla Jasmine… Et tous, ou presque, sont dans la tourmente. S’ils ont tous le point commun de s’être déclarés comme étant des musulmans — Dylan Thiry se présente même comme un « influenceur musulman » —, ils ont également une autre similitude de taille : ce sont des « influenceurs ». Comprenez des personnalités avec, sur leurs réseaux sociaux, un nombre d’abonnés conséquent qui leur permet de vendre à des marques des placements de produits, parfois à prix d’or. Et forcément, ils intéressent plus les médias que les influenceurs musulmans moins « bling-bling ».
Mais, à en croire Bruno Le Maire, le ministre français de l’économie, « la fête est finie ». Le ministre a en effet décidé de s’attaquer aux influenceurs les moins scrupuleux qui font la promotion de produits peu recommandables. « On ne trompe pas le consommateur, on n’abuse pas des arnaques, certains allant beaucoup plus loin », indique Le Maire, alors que le rappeur Booba, ces derniers mois, s’est de son côté lancé dans une croisade contre ceux qu’il nomme « influvoleurs ». Et particulièrement contre Magali Berdah, la prêtresse du milieu.
Des démarches sincères ?
Dans un article intitulé « Conversions à l’islam : des influenceurs plus ou moins de bonne foi », Libération montre que, pour ces influenceurs qui se disent musulmans, l’islam est un business comme un autre. Certains oscillant entre soirées bien arrosées et ramadan, entre photos d’eux bière à la main et prises de vue devant des mosquées. « Jazz est fière d’être musulmane et (…) sa manière de montrer sa religion reste light car au final tu ne vois pas grand-chose sur ses réseaux, indique à propos de Jazz Correia Dylan Thiry. Elle montre son certificat de conversion en story, la photo disparaît au bout de vingt-quatre heures puis elle reprend sa life. Ça passe crème, on reste dans de l’islam tranquillou ».
Une façon de voir les choses qui ne choque pas Dylan Thiry. Ce dernier tente d’assurer lui aussi que sa démarche est sincère avec, pour preuve, le fait qu’il a perdu « beaucoup plus » que gagné depuis l’annonce de sa pratique religieuse. « Rien que le fait d’arrêter de promouvoir les paris sportifs, car interdits dans l’islam, ça me fait perdre presque 30 000 euros par mois », explique-t-il sans sourciller. Mais se lancer dans le « dropshipping », une pratique légale, certes, mais peu morale — il s’agit de vendre plus cher des produits de piètre qualité achetés à bas prix en Chine —, n’a pas semblé le déranger.
D’ailleurs, en 2003, le même journal, Libération, assurait que, contrairement au manque à gagner annoncé par Thiry, les conversions pouvaient rapporter gros pour les stars de télé-réalité. « Derrière une démarche d’apparence sincère, se cachent pour certains des plans de communication destinés à gagner des abonnés, et de l’argent », écrivait le journal. Thiry a d’ailleurs largement joué sur sa religion pour promouvoir ses comptes, avec des conversions en live, avec un imam, une grosse interview avec Tariq Ramadan ou encore des voyages humanitaires, comme à Madagascar, qui lui valent aujourd’hui des accusations de trafic d’êtres humains.
L’islam, manque à gagner ou véritable business ?
L’influenceur dément se servir de la religion pour se faire de l’argent. Il assure ne pas être « rentré dans l’islam pour un buzz ou quoique ce soit sur les réseaux », mais avoue cependant qu’il s’agit d’« un levier de communication pour certains, oui. Aller à Abu Dhabi, mettre un foulard et faire une photo devant la mosquée, c’est génial. Mais partir en Palestine, parler d’islam tous les jours, parler avec un imam et faire des lives, interviewer Tariq Ramadan, on ne gagne pas avec ça ».
Problème : aujourd’hui, des « off » sortent, montrant que Dylan Thiry est conscient de participer à des arnaques ou laissant entendre qu’il propose des entourloupes à l’adoption. Son association, lancée en 2021, « Pour nos enfants », a quant à elle récolté plus de 250 000 euros. Elle a été dissoute moins d’un an après sa création. Trois donateurs, étonnés de ne pas savoir ce qui a été fait de l’argent, alors qu’il était promis à l’aide humanitaire à Madagascar, mais aussi la trésorière et la vice-présidente de l’association ont porté plainte contre X pour « abus de confiance ». Une autre ancienne collaboratrice de l’influenceur a porté plainte pour « menaces » et « violation de la vie privée »
Finalement, « l’islam tranquilou », c’est peut-être également la façon de voir les choses de Dylan Thiry.