Le 3 février, un jeune Italien a semé la terreur dans la ville de Macerata, une commune de 43 000 habitants. L’homme qui sillonnait le centre-ville en voiture a tiré plusieurs coups de feu, uniquement sur des personnes « de couleur ».

Une information rapportée par la police italienne : « Les blessés confirmés sont de nationalité étrangère », a t-elle écrit dans un tweet. Les six victimes, cinq hommes et une femme, sont en effet originaires du Mali, du Ghana et du Nigeria. 

Juste après ses tirs, l’attaquant a ensuite arrêté sa voiture devant le monument aux morts de la ville. Il a eu le temps, avant d’être interpellé par la police, de sortir une écharpe tricolore, de faire un salut fasciste et de hurler « Viva Italia ! », selon les témoignages recueillis par la presse italienne. 

L’homme identifié s’appelle Luca Traini. Agé de 28 ans, il a rapidement expliqué le motif de son geste aux enquêteurs. Pour lui, l’assassinat d’une jeune italienne de la région (dont les premiers résultats de l’enquête ont mis en cause un migrant d’origine nigériane déjà condamné par la justice et sans permis de séjour), a été « le déclencheur » de son action. 

Le 31 janvier, le cadavre d’une jeune femme de la région, Pamela Mastropietro, âgée de 18 ans, avait en effet été découvert non loin de Macerata, découpé en morceaux et placé dans deux valises.

« Mein Kampf » et des livre d’extrême-droite retrouvés au domicile du tueur 

« J’étais en voiture et j’allais au gymnase quand j’ai entendu pour la énième fois à la radio l’histoire de Pamela, aurait déclaré Luca Traini aux enquêteurs, selon le journal Corriere della sera.  « J’ai fait demi-tour, j’ai ouvert mon coffre-fort et j’ai pris le pistolet. J’ai décidé de tous les tuer ».

Hier, la police italienne s’est rendu au domicile du tireur pour en savoir davantage sur son profil. Les enquêteurs y ont découvert une copie du livre « Mein Kampf » et un livre d’histoire sur le dictateur fasciste Benito Mussolini ainsi que d’autres ouvrages liés à l’extrême-droite. Une enquête a donc été ouverte pour tentative de « massacre aggravé par un objectif raciste » et « port illégal d’arme ». 

Luca Traini s’était fait connaître en juin dernier, se présentant en tant que candidat sous l’étiquette de la Ligue du Nord (parti souverainiste xénophobe, anti immigration et anti-européen) à des élections locales dans une commune de la province de Macerata.

Ancien videur au crâne rasé, il aurait également, selon la presse italienne, fait tatouer son surnom « Lupo » (« le loup ») en lettres gothiques noires sur son cou, ainsi qu’une croix celtique sur un bras et une dent de loup, symbole nazi, sur la tempe droite.

Suite à la fusillade, le ministre italien de l’Intérieur, Marco Minniti, a rapidement réagi, et a qualifié ce drame comme étant empreint d’une « évidente haine raciale ». Il a dénoncé cet acte, marqué par un « extrémisme de droite avec des références claires au fascisme et au nazisme ».

 Pour le chef de file de la Ligue du Nord, Matteo Salvini, qui a marqué ses distances avec Luca Traini, « quelqu’un qui tire est un délinquant, abstraction faite de la couleur de la peau ». L’homme politique, en pleine campagne électorale pour les législatives début mars, a également lié cette fusillade à l’« invasion » migratoire en Italie. 

« J’ai hâte d’arriver au gouvernement pour ramener dans toute l’Italie la sécurité, la justice sociale et la sérénité », a-t-il déclaré. Quelques jours plus tôt, il avait également qualifié d’« homicide d’Etat » le meurtre de la jeune Italienne.

Des législatives sous tension en Italie, le ministère de l’Intérieur tente de calmer les esprits

Le ministre de l’Intérieur a souligné que c’est la première fois dans le pays que « la tension interraciale explose de cette façon ». Et il a tenu à mettre en garde les candidats aux législatives contre toutes dérives. 

« Même des phrases apparemment inoffensives peuvent déclencher de fortes réactions. Nous avons encore un mois de campagne, le risque que la haine cause de nouvelles violences est très élevé », a-t-il prévenu.

Le 15 janvier dernier, Attilio Fontana, candidat pour le poste de gouverneur de la région Lombardie et issu du parti de la Ligue du Nord avait notamment déclaré à la radio :« Si nous acceptons tous les migrants, nous ne serons plus nous. (…) Nous devons décider si notre ethnie, notre société, notre race blanche doit continuer à exister ou si elle doit être anéantie. Ce n’est pas une question d’être raciste ou xénophobe. »

Le ministre de l’Intérieur italien a également annoncé vouloir intensifier sa surveillance des réseaux sociaux « pour empêcher que des contenus offensifs ou visant à fomenter des agressions puissent être mis en ligne ». 

A Macerata, où vivent environ un millier de Nigérians, la population avait prévu une célébration de solidarité samedi, en hommage à la jeune femme tuée. 

« Ce crime nous a bouleversés comme tous les habitants de Macerata. Nous voulions montrer notre attachement à la ville et demander à tout le monde, et surtout aux politiques en campagne électorale, de ne pas transformer ce crime horrible en une haine indiscriminée. Nous n’en avons pas eu le temps », a confié à Il Corriere Daniel Amanze, un homme d’origine nigériane et responsable d’une association d’aide aux immigrés.