Comme Cédric Herrou et Pierre Alain Mannoni il y a peu, Houssam El Assimi est traîné au tribunal pour avoir aidé des exilés, mais contrairement aux deux premiers, ce n’est pas d’être un «passeur» dont on l’accuse. À défaut c’est l’arme ordinaire de criminalisation des militants qui est employée contre lui ; l’outrage et rébellion contre les forces de l’ordre. Inutile de revenir sur cette accusation, aussi infondée que prévisible, tant nombre d’activistes ont eu à en répondre avant lui alors qu’ils étaient innocents : personne n’est dupe de cette technique policière bien connue, qui permet à l’agent qui dépose la plainte d’encaisser une prime en même temps que de se couvrir contre les violences dont il est lui-même responsable.

« L’acharnement qui le cible particulièrement ne peut pas être totalement indifférent du fait qu’Houssam est arabe »

Ce n’est pas la première fois qu’Houssam El Assimi est ciblé par la police à proximité des exilés, il affronte aujourd’hui son deuxième procès en un an (relaxé au premier), auquel il faut ajouter trois garde-à-vues, et trois strangulations policières. Mais si ce n’est pas sous la qualification de «passeur» que s’ouvre aujourd’hui son procès, c’est pourtant de sa capacité à faciliter les passages, bien plus que pour Herrou et Mannoni, dont il est véritablement question. Certes, l’acharnement qui le cible particulièrement ne peut pas être totalement indifférent du fait qu’Houssam est arabe, a fortiori de la part d’un État et d’une police dont le racisme ne fait définitivement plus mystère, mais à bien y regarder il cumule en plus quelques circonstances aggravantes : non seulement il est arabe, mais en plus il parle arabe, et pour ne rien arranger il parle arabe aux exilés aussi bien qu’il parle français aux nationaux, et il ne se prive jamais de le faire, d’un côté autant que de l’autre, au grand désespoir d’un système qui s’emploie quotidiennement à reléguer les uns loin des autres, fût-ce au prix des plus intolérables violences d’État.

Ce n’est donc absolument pas par hasard si c’est au milieu d’une rafle policière contre les exilés, la 19ème en moins de deux mois, qu’Houssam a été arrêté, c’est à dire précisément là où la police dépense ses moyens de clôturer le monde à établir autant de frontières intérieures qu’il y a d’exilés nécessairement décidés à n’en tenir compte. Dès lors, comment ne pas voir dans ces persécutions policières l’exécution d’une vengeance d’État contre ceux qui sont parvenus à franchir les frontières extérieures au mépris de la militarisation croissante de celles-ci ?

À constater la détermination d’Houssam à se tenir debout auprès d’eux alors que l’autorité s’y oppose, et à voir son obstination à défendre leurs droits à sens contraire d’un État qui s’applique à en faire des sans-droits, on peut être tenté de se dire que l’inculpation pour «aide à l’entrée, à la circulation et au séjour d’étrangers en situation irrégulière» aurait bien pu être retenue après tout, qu’Houssam est un passeur, du genre de ceux qui opposent un refus indispensable à cette obscure tentation au repli, dans laquelle l’inclusion des uns semble objectivement dépendre de l’exclusion des autres.

« Quiconque se tient auprès des sans-droits s’expose lui-même à la déchéance de ses droits »

Ainsi quiconque se tient auprès des sans-droits s’expose lui-même à la déchéance de ses droits, de toute évidence le privilège d’être citoyen n’est pas seulement exclusif mais il est aussi révocable. Le 30 septembre dernier, pour avoir tenté d’être ce passeur de droits auprès des exilés illégalisés par l’Etat, Houssam El Assimi a été arrêté, traîné au sol et étranglé, et c’est lui qui doit répondre de violences et qui risque la prison.

Et pourtant, comparativement à Herrou et Mannoni, l’élan de solidarité à son égard reste beaucoup plus confidentiel : les deux premiers cumulent respectivement 60..000 et 100.000 signatures de soutien contre seulement 29.000 pour lui, et Cédric Hérrou récolte ainsi plus de 60.000 € de dons tandis que le collectif d’Houssam, La Chapelle Debout, peine déjà à rassembler les 5.000 euros nécessaires aux frais du procès. Considérant que le nombre des passages que ce collectif a contribué à ouvrir, il devrait être permis d’espérer voir cet écart se réduire rapidement !

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