En ce moment

– Qu’est-ce que le Halal ?

Étant une population de plus de 1,6 milliard de personnes, le nombre des musulmans croit deux fois plus vite que celui du reste du monde ce qui donne une importance significative à la question du Halal et ses différentes appréciations.

Le Halal d’un point de vue religieux :

Dans l’Islam, la terminologie Halal vient définir tout ce qui est légal et permis à consommer en opposition au mot « Haram » qui désigne tout ce qui est impur et interdit par la religion. Pour simplifier la donne, le porc, la drogue, l’alcool, la bête morte, le sang et la bête sur laquelle on a invoqué un nom autre que celui de Dieu sont considérés comme des consommations interdites dans l’Islam.

Le concept s’applique à tous les domaines relatifs à la vie quotidienne des musulmans, mais il est plutôt plus fréquent dans leur consommation. Ainsi, on différencie la viande et ses produits dérivés qui ne doivent pas contenir de la gélatine du porc. Autre que la nourriture et les boissons, le Halal s’applique à d’autres activités comme la finance, le tourisme, la cosmétique et même dans l’immobilier.

D’un point de vue technique/Hygiène : Le Halal et Bien-être animal

Le Halal implique un processus d’abattage animal réalisé avec humanité et conforme aux principes de la Charia, tout en invoquant le nom de Dieu pendant l’exécution. En d’autres termes, l’abattage – appelé également « Dhabiha » – prend en considération ces principes :

  • Orienter la bête, étant vivante, vers la Mecque
  • Le sacrificateur doit être musulman et reconnu par un organisme religieux. Ce dernier devra prononcer le nom de Dieu avant d’égorger la bête.
  • L’incision devra être rapide et profonde afin de vider l’animal de son sang d’une manière
    efficace et rendre la viande plus hygiénique.

Ce processus permet de respecter la doctrine musulmane et fait éviter aux animaux la souffrance des autres méthodes.

  • La certification Halal

Comme dans plusieurs autres domaines, le Halal se dote d’une certification attestant de la conformité d’un produit ou service avec les règles de la jurisprudence islamique. Ceci concerne les composants de base de ce produit, sa production, son conditionnement et ses procédures de commercialisation.

Le sujet de certification est à l’origine de plusieurs polémiques dans le milieu du Halal vu les difficultés qui existent pour trouver des professionnels qualifiés dans cette matière. L’amateurisme gagne du terrain à raison du grand nombre de certificateurs qui ne présentent pas de services conformes aux attentes des clients.

-L’histoire du Halal

  • Le 20 ème siècle :

La connotation Halal existe depuis plus de 1400, mais l’utilisation économique du terme n’a vu le jour que durant les dernières décennies. L’histoire a commencé en 1945 lorsqu’on a créé en Afrique du Sud le Muslim Judicial Council Halal Trust, un organisme qui surveille le respect des lois de l’islam en matière d’alimentation. 24 ans après, soit en 1969, un premier certificat Halal voit le jour en Thaïlande où le bureau du Cheikhoui a délivré cette attestation à une société exportatrice au Koweït.

Ensuite, les initiatives se sont multipliées durant les années 70 avec l’émission en Malaisie de lettres de certification Halal par le Departement of Islamic Developement Malaysia (JAKIM) en collaboration avec un cabinet du Premier ministre. Toujours en 1974, L’Australian Federation of Islamic Councils (AFIC) a été approuvé comme l’unique organisme habilité à certifier la viande provenant d’un processus d’abattage conforme aux rites islamiques dans le pays. En 1975, c’est au tour des Etats- Unis de s’y mettre avec les Islamic Services of America qui ont commencé à certifier les produits dans l’Iowa. En 1978, la Singapour déclare que le seul organisme de certification Halal du pays est l’Islamic Religious Council. En 1979, l’introduction du Halal au Brésil par l’intermédiaire du Centre des aliments Halal du Centre islamique brésilien.

Trois années plus tard, soit en 1982, un groupe de scientifiques de chercheurs musulmans à Bedford créent l’Islamic Food and Nutrition Council of America dans l’Illinois. Durant l’année 1983, le programme « Australian Government Muslim Slaughter » voit le jour suite à une initiative de l’Australian Quarantine Inspection Service qui visait le contrôle de la viande Halal destinée à l’export. En 1984, la signature d’un contrat annuel entre la Federation of Islamic Associations de Nouvelle- Zélande et la Meat Industry Association – surnommée à l’époque New Zealand Meat Producers Board- pour stipuler la vente de prestations de certification Halal. Dans l’année 1989, on crée l’Indonesian Council of Ulama en Indonésie pour réaliser une étude sur la réglementation du Halal.

Durant les années 90, la certification Halal s’est encore développée à commencer par la Malaisie où on certifiait les produits à l’aide d’un logo Halal depuis 1994. Parallèlement en Thaïlande, le Halal Science Centre est créé au sein de la Chulalongkorn University. De même pour l’organisation indépendante Halal Food Authority qui a été créée au Royaume-Uni pour suivre et authentifier le commerce de viande et de volaille Halal dans ses terres. En 1996, l’Afrique du Sud développe le South Africa National Halaal Authority (SANHA) dans le but de vérifier la conformité des produits étiquetés Halal aux principes des rites de l’islam. En 1997, le terme Halal obtient sa première définition internationale élaborée par la commission Codex Alimentarius qui se rattache à l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture. Deux années plus tard, soit en 1999, une tutelle rassemblant les organismes de certification Halal indépendants voit le jour à Jakarta en Indonésie sous le nom de : World Halal Food Council / World Halal Council.

  • Le 21 ème siècle :

Les années 2000 ont marqué l’histoire du Halal par l’introduction des normes et règlementations dans le domaine afin de standardiser les exigences relatives au marché Halal. En 2001, une norme malaisienne éditée par le Central Islamic Committee voit le jour pour réglementer la certification Halal au niveau national avant d’accorder les activités Halal à la compétence de la Food and Islamic Consumer Products Division en 2002. Toujours en Malaisie où on a publié la toute première norme Halal officielle en 2004 : la norme MS1500 :2 004 – Halal Food – Production, Preparation, Handling and Storage – General Guideline avant qu’elle ne subisse une mise à jour en 2009 et devenir MS1500 :2009. Parallèlement, le Shapers Malaysia fonde le MIHAS qui devient par la suite sous la propriété du gouvernement malaisien.

En 2005, l’entrée en vigueur de l’Australian Government Authorised Halal Program (AGAHP) qui énumère une liste d’exigences à respecter par les producteurs des produits Halal dont l’obligation de documenter les procédures de préparation, d’abattage, d’identification, de transformation, de séparation et de certification pour la filière de la viande Halal ainsi que l’obligation d’avoir recours à des sacrificateurs et inspecteurs enregistrés auprès des organismes islamiques homologués. Dans la même année, le World Halal Council publie à son tour sa première norme. Dès cette date, le marché Halal a pris un sérieux virage notamment avec l’organisation du premier World Halal Forum en 2006 à Kuala Lumpur pour rassembler les principaux acteurs du secteur. Cette année a assisté également à la création de la Halal Industry Development Corporation qui vise à coordonner les actions de développement de tout le secteur en Malaisie.

En 2007, le Brunéi Darussalam publie la norme PBD24 :2007 pour certifier les aliments Halal et leurs lignes directrices (BCG Halal 1 – First Edition 2007). En 2008, les travaux de la rédaction de l’avant- projet de la norme des aliments Halal « GSO 1931 Halal Food Part 1: General Requirements. » commencent chez l’Organisation de Normalisation du Conseil de Coopération du Golfe (GSO). Durant l’année 2010, il a été sujet de préparer les normes OCI/SMIIC pour garantir la conformité des méthodes de métrologie, d’analyses, de normalisation et de fonctionnement des laboratoires. Ce travail a été confié au SMIIC qui fait partie de l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI). De l’autre côté, Le Comité européen de Normalisation (CEN) a créé un groupe de travail chargé d’analyser la faisabilité d’une norme européenne pour les aliments Halal.

En 2012, une norme destinée pour les produits cosmétiques et parfums Halal s’ajoute au dispositif du SMIIC. La norme a été éditée par L’Emirates Standards and Metrology Authority (ESMA) qui devient ainsi la première instance de réglementation technique de l’OCI pour cette catégorie de produits. Après le World Halal Forum, vient le tour du premier sommet mondial de l’économie islamique (Global Islamic Economy Summit) qui a été organisé en 2013 à Dubaï dans le cadre de l’initiative « Dubaï : capitale de l’économie islamique. Ce sommet a permis de définir les six piliers de l’économie islamique à savoir la finance, l’alimentation, le voyage, le mode, les médias, les produits cosmétiques et les produits pharmaceutiques. Suite à ce sommet, on a créé le Dubai Islamic Economy Development Centre (DIEDC) qui a permis de publier le premier rapport international sur l’état de l’économie islamique. Reuters, Thompson et DinarStandard ont également contribué à ce projet.

Durant l’an 2015, L’Autorité de normalisation et de métrologie des Émirats lance le logo officiel de la « National Halal Mark for Halal certification » lors de la Gulfood Exhibition 2015 à Dubaï avant de l’accorder à deux entreprises conformes aux standards de sa norme. En parallèle, le Pakistan Halal Authority a vu le jour au Pakistan pour mettre en place des normes et des procédures qui servent à l’organisme de normalisation local en vue d’améliorer la production et le commerce Halal. De l’autre côté, Dubaï a lancé dans la même année le premier portail spécifique à l’économie islamique comme étant un guide international des règles de base de l’économie conforme aux rites de l’islam.

-Le marché Halal

Depuis plus de 1400 ans, les musulmans échangeaient des produits dits Halal, notamment les produits alimentaires, mais l’utilisation du terme « Marché Halal » ne remonte qu’à quelques années à savoir l’an 2004 lorsque la Malaisie a publié sa première norme officielle en la matière : la norme MS1500:2004. Étudier ce marché revient à analyser la réalité d’un phénomène économique très récent qui est en pleine croissance, un phénomène à grand potentiel qui ne connaît pas de frontières géographiques, ni culturelles, ni même religieuses. En effet, le Halal est accessible à tout le monde et concerne tous les acteurs économiques et financiers du monde entier.

  • Le Halal : un marché au potentiel croissant

Dirigé vers plus de 1,6 milliard de personnes dans le monde, le marché Halal affiche un énorme potentiel commercial et enjeux politiques pour tous les gouvernements au monde, non seulement ceux des pays musulmans. 2300 milliards de dollars représentent le chiffre du marché Halal dans le monde selon une évaluation faite par l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI) qui se base en Arabie-Saoudite. La croissance de la population musulmane va deux fois plus rapidement que celle du reste du monde. De telles données confirment l’importance de l’industrie Halal comme étant un des plus forts secteurs de l’économie mondiale ce qui consolide les prévisions autour de son potentiel.

Au niveau des statistiques, un récent rapport réalisé par Thompson et Reuters en 2015 étudie l’évolution du marché Halal et donne les prévisions concernant sa croissance pour l’année 2020 par rapport aux données de l’année 2014 :
– Le marché de la finance islamique passera de 1820 à 3250 milliards de dollars.
– Le marché des produits alimentaires évoluera de 1130 à 1590 milliards de dollars
– Le marché de la mode augmentera de 230 à 327 milliards de dollars
– Le marché des médias et divertissements passera de 179 à 247 milliards de dollars
– Le marché du tourisme (voyages) passera de 142 à 233 milliards de dollars
– Le marché des produits pharmaceutiques passera de 75 à 106 milliards de dollars
– Le marché des produits cosmétiques évoluera de 54 à 80 milliards de dollars

A travers ces chiffres, on constate que l’industrie Halal est en train de gagner doucement son terrain, notamment avec la croissance démographique des musulmans et le développement des structures et organismes qui s’intéressent à ce secteur. C’est ainsi que beaucoup de pays non-musulmans se sont lancés dans l’industrie Halal pour s’adapter à la forte demande de leurs ressortissants musulmans ou pour attirer davantage de touristes musulmans. En Corée du Sud par exemple, il y a une forte émergence du Halal dans le marché local traduit par les initiatives lancées par plusieurs restaurants qui se sont convertis à l’alimentation Halal.

Cependant, les acteurs de cette industrie affirment que l’Afrique présente un grand potentiel, estimé à plus de 150 milliards de dollars, mais il reste inaccessible, voire inexistant à cause du manque de la vulgarisation et des efforts pour faire connaitre ce marché.

    • Que représente l’économie Halal dans le monde ?

 

Il est difficile d’établir un constat global et définitif sur l’état du marché Halal dans le monde puisqu’il n’existe aucun mécanisme ou outil permettant de mesurer les échanges commerciaux des produits Halal d’autant que plusieurs de ces produits ne sont pas encore certifiés (fruits et légumes, huiles, légumes secs, etc.).

Le marché mondial Halal est estimé autour de 3,6 billions de dollars et tourne autour de 2 milliards de consommateurs dont les 1,7 milliard de musulmans. Toutefois, les rapports et études traitent souvent le marché Halal des aliments et boissons où les statistiques sont plus disponibles. Selon un rapport publié par le gouvernement de Dubaï en 2014 et réalisé par Thompson Reuters et DinarStandard, le marché Halal des aliments et boissons a été estimé à 1,37 billion de dollars ce qui représente déjà 18,2% du marché mondial dans cette catégorie. De l’autre côté, la consommation des aliments et boissons Halal a dépassé dans cette même année le niveau de la consommation alimentaire en Chine, celle des Etats-Unis, celle du Japon et de même par rapport à l’Inde qui ont consommé respectivement 857 milliards de dollars, 768 milliards de dollars, 445 milliards de dollars et 434 milliards de dollars.

L’industrie Halal n’intéresse pas uniquement les musulmans, mais elle représente un intéressant marché pour tout le monde. Cependant, la plus grande concentration au niveau des aliments et boissons Halal concerne les pays de la zone MOAN (Moyen-Orient et Afrique du Nord) qui dépense 441 milliards de dollars devançant ainsi l’Asie du Sud avec ses 238 milliards de dollars, l’Asie de l’Est avec ses 230 milliards de dollars, l’Asie centrale avec ses 218 milliards de dollars et l’Afrique subsaharienne qui a dépense 127 milliards de dollars dans l’alimentation Halal en 2014.

      • Quel poids a le marché Halal en France ?

En France, le marché Halal fleurit petit à petit. Le sujet intéresse de plus en plus les médias notamment avec l’augmentation des flux d’immigration des musulmans et surtout du Maghreb. Un sondage avait été fait en 2010 par l’IFOP et a démontré que 91% des musulmans pratiquants consomment le Halal et que 44% des non-pratiquants le font également. Pour la fréquence, 59% des musulmans interrogés ont confirmé qu’ils consomment de la viande Halal de manière systématique, alors que 28% d’entre eux le font occasionnellement.

Étant difficile d’avoir des statistiques officielles, vu l’interdiction des statistiques ethniques en France, les chiffres concernant le Halal en France restent proportionnels. Des études réalisées par des cabinets de marketing identitaire dont l’agence Solis qui a estimé en 2010 que le marché français du Halal représentait 5,5 milliards d’euros sur une hypothèse de 5 millions de musulmans habitant l’Hexagone. L’étude stipule également que 4,5 milliards d’euros tournent autour des produits alimentaires et 1 milliard d’euros pour la restauration hors domicile. De son côté, le cabinet Xerfi a validé la même conclusion que son homologue Solis en avançant le chiffre de 4 milliards d’euros comme valeur du marché Halal en France.

Le concept Halal gagne du terrain aussi chez les industriels où on observe que de grandes marques se sont lancées dans la production d’une gamme Halal comme Nestlé et Fleury Michon dans l’agroalimentaire. D’autres marques se sont spécialisées dans le domaine comme Medina Halal et Isla Délice. Un sondage réalisé par l’institut Nielson affirme le constat chez la grande distribution où les ventes des produits Halal avec code à barres se sont élevées à 205 millions d’euros en 2013. L’institut Nielson a rapporté que les marges de progression des ventes de produits Halal dans les hyper et supermarchés sont importantes et il l’estime à une croissance de plus de 20% depuis 2013 et de plus de 7,5% entre 2015 et 2016.

-Les produits Halal

Le terme produit Halal désigne souvent les aliments et boissons que leur consommation est autorisée par la charia. Cependant, ce concept licite s’étend sur plusieurs autres secteurs de production et de consommation touchant au quotidien de l’individu musulman et ses activités de loisirs.

      • L’agroalimentaire

Du côté des aliments, le Halal est tout ce qui provient d’une origine animale licite, c’est-à-dire préparé ou extraite selon les règles de l’islam. On parle souvent de la méthode d’abattage – dite Dhabiha – de l’animal pour légitimer sa consommation pour les musulmans, mais on évoque aussi d’autres règles : la provenance de la bête en question et la manière dont elle a été traitée avant sa mort. Techniquement, l’abattage prescrit par la charia doit s’effectuer par un musulman en invoquant le nom de Dieu le plus grand et en utilisant un couteau propre et bien aiguisé qui sert à effectuer une incision profonde et rapide à la pointe du cou. En général, l’exemple le plus connu d’aliment qui contourne ces principes est le porc que sa viande est interdite (Haram) pour les musulmans.

Autre que les produits d’origine animale, les aliments provenant de la mer par principe sont tous Halal d’après le Coran. De même pour les fruits et légumes, les fruits à coque, les légumes secs et les graines qui sont considérés comme des aliments naturellement Halal. Cependant, la diversification des processus de transformation industrielle alimentaire, des chaines d’approvisionnement et la complexité des échanges internationales dans les sous-secteurs du marché Halal font que certains produits alimentaires transformés peuvent être interdits par la charia à cause de l’origine de l’un de leurs ingrédients ou leurs additifs. Il s’agit surtout du cas de la gélatine et de la présure qui proviennent du porc ce qui rend interdits les aliments dans lesquels ils se trouvent.

Concernant le marché alimentaire Halal, il faut distinguer entre les produits naturellement Halal et les produits de source animale ou transformés :

      • Du côté de la viande et volaille non transformé, le marché assiste à une forte croissance notamment dans les pays de l’Organisation de Coopération Islamique (OCI) qui ont enregistré une augmentation de leurs importations en la matière de 227% durant les dix dernières années pour atteindre la barre des 15,3 milliards de dollars en 2014.
      • Pour les aliments transformés (une catégorie qui englobe aussi la viande, les fruits de mer et la volaille), les dix dernières années ont été très fructueuses pour les pays de l’OCI qui ont enregistré une croissance de leurs importations de l’ordre de 305%.
      • Pour les fruits, légumes et fruits à coque avec tous leurs produits, le marché a atteint la barre des 227 milliards de dollars dans le monde en 2014. Pour les pays de l’OCI, les importations de ces produits ont augmenté de 244% durant la dernière décennie pour se situer à 22,4 milliards de dollars en 2014, tandis que leurs exportations ont augmenté du double du volume durant la même période pour atteindre les 21 milliards de dollars en 2014.
      • Concernant le marché des céréales et graines (à l’exception des boissons alcooliques), il a enregistré une hausse de 165% pendant les dix dernières années pour se situer au tour des 135 milliards de dollars en 2014. Pour les pays de l’OCI, les importations ont atteint les 50,8 milliards de dollars en 2014 réalisant une croissance de 144% sur les dix dernières années, tandis que les exportations ont atteint les 6,7 milliards de dollars en 2014.
      • Pour les produits laitiers, œufs et miel qui sont certifiés Halal (de nombreux produits laitiers suscitent la méfiance à cause de l’utilisation de la gélatine dans leurs recettes), le marché mondial s’est élevé à 96 milliards de dollars en 2014. Les pays de l’OCI ont importé de l’ordre de 16,7 milliards de dollars dans cette année réalisant une croissance de 191% pendant les dix dernières années.
      • Le marché des huiles, des graisses et des cires a atteint 94,1 milliards de dollars en 2014 témoignant d’une croissance de 154% sur les dix dernières années. De même pour le marché des sucres, de confiseries et cacao qui a atteint 93 milliards de dollars en 2014 réalisant un essor de 111% sur les dix dernières années.
      • Les produits cosmétiques

Si le terme « Halal » est souvent associé aux produits alimentaires et les boissons, d’autres niches commencent à se faire une place dans cette économie. De nos jours, on parle de plus en plus de l’émergence du marché des produits cosmétiques Halal à savoir les maquillages, les produits de soins, les crèmes, les shampoings, les produits d’hygiène, etc. En effet, on parle plus précisément des composantes des cosmétiques qui doivent être licites à l’égard de la charia.

Les consommateurs musulmans se méfient généralement des produits d’hygiène à cause de certains de leurs ingrédients qu’on retrouve dans les rouges à lèvres, les shampoings, les crèmes, les lotions, etc. Parmi ces composantes douteuses, on cite :

    • L’acide hyaluronique et le collagène qui contiennent des dérivés de placenta de vache ou de porc et qui sont utilisés dans les produits antivieillissement.
    • L’acide stéarique issu de l’estomac du porc et utilisé dans les produits de lubrification.
    • La kératine issue des dérivés de poils d’ongles et de sabots de vache ou de porc et qui sert comme base pour fabriquer le shampoing.

Avec des prévisions d’avoir 6% du marché mondial des cosmétiques en 2019, ce segment représentait déjà 20 milliards de dollars en 2014 ce qui pousse de plus en plus les gouvernements et grandes marques à investir dans le Halal. Certains pays commencent même à mettre les réglementations nécessaires pour obliger les industriels à avoir des certificats Halal.

En Indonésie, un marché qui compte plus de 200 millions de musulmans, le géant français des cosmétiques l’Oréal avait procédé à des certifications Halal pour des centaines de ses matières premières et ses lignes de production afin de subvenir aux besoins très exigeants de ce marché asiatique. De même pour l’allemand BASF qui a opéré à fait obtenir le label Halal pour 145 de ses ingrédients destinés à produire des produits de beauté et d’hygiène.

  • Produits pharmaceutiques

A l’instar des produits cosmétiques, le Halal se trouve désormais dans la médecine où on commence déjà à certifier des médicaments et traitements. Les professionnels de l’industrie pharmaceutique travaillent sur les recherches et le diagnostic des composantes pour identifier le caractère Halal dans les médicaments. Il est ainsi sujet de remplacer la gélatine du porc, principal ingrédient de plusieurs médicaments, par du poisson ou du maïs.

Le concept avait été lancé en Australie lorsqu’un pharmacien de Sidney a eu l’idée de lancer une institution de certification de médicaments Halal qui certifient les produits pharmaceutiques par le label HCM (Halal Certified Medecine) et depuis il se propage petit à petit dans le monde entier pour peser actuellement plus de 156 milliards de dollars avec des prévisions d’atteindre les 214 milliards de dollars en 2020 ce qui signifie ainsi une croissance de 6,5%.

Toutefois, ce concept ne semble pas avoir une unanimité dans le monde musulman. En effet, certaines voix pensent qu’il s’agit tout simplement d’un faux problème parce que l’islam prononce que la vie passe avant la mort. Du coup, les musulmans ont intérêt à sauver leur vie par tous les moyens qui se présentent devant eux, peu importe l’origine du médicament, et même s’il est extrait du porc. En parallèle, d’autres avis pensent que tous les malades ne sont pas sujets de mort et ils ont la capacité de choisir entre un médicament Halal et un autre traitement litigieux. Ces derniers sont même d’accord que les musulmans qui ont cette possibilité de choix doivent obligatoirement opter pour le produit Halal.

    li>Le tourisme Halal

Les prévisions démographiques dans le monde entrevoient que la proportion des musulmans atteindra les 26,5% d’ici 2030. Ce chiffre pousse les professionnels du tourisme à réfléchir autour d’une offre 100% Halal. C’est ainsi que depuis 2010, on parle davantage du concept de « Muslim Friendly » dans les offres touristiques ou encore du tourisme Halal, un sous-secteur très performant du tourisme religieux. En gros, cette notion se dirige vers les établissements qui offrent des prestations licites et conformes aux règles de la charia.
Généralement, on évoque les concepts de :

  • -Hôtels Halal : Ces hôtels s’appliquent à un système islamique strict : pas d’alcool, repas conformes aux méthodes d’abatages licites et certifiés Halal, des plages et spas séparés par des horaires fixes pour les hommes et pour les femmes, une salle de prière ou une mosquée disponible pour les pratiquants, un code vestimentaire adapté à la charia, un programme spécial pour le mois du Ramadan qui respecte l’heure de jeûne, des chambres indiquant la direction de la Mecque et offrant un tapis de prière et un livre du Coran.
  • -Compagnies aériennes Halal (ou vols Halal) : De nombreux transporteurs aériens ont prévu le grand potentiel du marché Halal et se sont adaptés à ses besoins. Ils proposent désormais des vols, parfois avec séparation entre hommes et femmes, sans servir de l’alcool avec des repas Halal dont même celui de la rupture du jeûne pendant le Ramadan, avec l’annonce des heures de prières, la mise à disposition des voyageurs de livres de Coran dans les pochettes des sièges et la diffusion d’émissions religieuses comme divertissements pendant le voyage.
  • -Application mobile « Muslim Friendly » : Beaucoup de pays, notamment non-musulmans, ont investis dans la création d’applications mobile qui servent comme guide pour le touriste musulman qui visite leur territoire. L’application propose une carte des mosquées les plus proches selon l’emplacement géographique, un guide des restaurants Halal à proximité, la direction de la Mecque (Qibla) et les horaires de prière. A titre d’exemple, le Japon était parmi les premiers développeurs de cette application en guise de préparation à l’accueil des milliers de musulmans attendus durant les prochains Jeux olympiques Tokyo 2020.

Évalué à plus de 145 milliards de dollars en 2016, la valeur du marché du tourisme Halal pourra atteindre la barre des 200 milliards de dollars en 2020, soit ainsi 10% du marché touristique au monde. Le nombre de voyageurs musulmans quant à lui passera de 108 à 150 millions de voyageurs par an durant la même période. Ce développement économique a provoqué la mise en place de toute une logistique internationale pour servir comme indicateurs à mesurer l’impact de cette catégorie dans le tourisme mondial.

Né suite à une collaboration entre MasterCard et CrescentRating, à l’issue du Forum Économique Mondial Islamique à Dubaï en 2014, le GMTI se présente comme un indice pour mesurer la traçabilité des offres de voyages Halal tout en prenant part des besoins et exigences des clients musulmans. L’indicateur permet d’avoir un index global de suivi de la croissance du tourisme Halal et propose des outils pour aider les acteurs de ce secteur. Afin d’atteindre ses objectifs, le GMTI a scanné près de 100 destinations pour dresser une suite de données relatives aux tarifs, la qualité des prestations, les services offerts et les efforts de fidélisation de la clientèle musulmane.

Les polémiques du Halal

Alors qu’il s’agit d’un marché très puissant à fort potentiel économique, le Halal suscite de nombreux débats davantage dans les pays non-musulmans où les règles de consommation Halal peuvent se confondre avec leurs méthodes ou croyances, et même chez les musulmans où certains sujets ne font pas une unanimité totale. Comme la viande Halal est le noyau de ce marché, les techniques de l’abattage animal font toujours école dont la plus grande polémique autour de l’abattage mécanique et celui par électronarcose.

  • Débat sur l’abattage mécanique et l’électronarcose

Entre abattage conforme aux rites islamiques et rentabilité industrielle, les intérêts se confrontent et on tombe souvent dans les polémiques. Dans l’islam, l’abattage licite est celui réalisé par un humain alors que ceci s’avère très couteux en termes d’argent et de temps pour les industriels qui préfèrent utiliser les machines. Ainsi, le respect des exigences Halal demeure difficile ce qui rend cette méthode interdite par l’islam même s’il existe quelques fatwas de savants pour essayer d’adapter ces pratiques aux consignes religieuses.

De l’autre côté, l’électronarcose est la méthode couramment utilisée et qui repose sur un procédé utilisant le courant électrique pour provoquer l’étourdissement de la bête. Il existe deux façons de faire : soit l’application de la décharge électrique sur tout le corps de l’animal, soit uniquement sur sa tête. La méthode se diffère selon la bête : on fait plonger la tête de la volaille dans un bac d’eau électrifiée, alors qu’on pose une pince avec deux électrodes sur la tête (ou une sur la tête et l’autre sur le corps) pour les bovins et ovins.

Cette technique vise à limiter la souffrance de l’animal pendant l’abattage en inhibant sa sensibilité à la douleur. Les acteurs du Halal, comme les certificateurs, sont souvent contre cette pratique en se référant à plusieurs avis religieux dont ceux des savants (oulémas) de l’Arabie Saoudite et fatwas qui interdisent l’électronarcose parce qu’il provoque la mort de l’animal avant l’abattage dans la plupart des cas ce qui rend sa viande Haram.

Cependant, d’autres avis stipulent qu’il peut y avoir un procédé d’électronarcose Halal dans le cas où la bête ne meurt pas avec le courant électrique. Il est donc question de repérer le dosage adéquat à l’animal pour l’électrifier sans le faire tuer afin de réduire sa souffrance pendant l’abattage. Les défenseurs de cette école de pensée se reposent la déclaration du Conseil de Jurisprudence Islamique, faisant partie de la Ligue Islamique Mondiale, qui stipulait que si l’animal reste vivant après lui avoir infligé cette décharge électrique et qu’il est abattu après ce procédé, l’abattage est conforme aux exigences islamiques et sa viande devient Halal.

L’abattage par électronarcose, dit Halal, doit respecter deux contraintes : le bien-être animal et la rentabilité industrielle. Ainsi, la décharge électrique infligée à l’animal ne doit ni le tuer, ni briser une partie de son corps afin de limiter sa souffrance et éviter les pertes dans les chaînes de production. La solution s’appelle alors l’électronarcose réversible qui n’entraîne pas la mort de l’animal, mais son réveil après son étourdissement. Il s’agit donc d’opter pour des voltages spécifiques aux caractéristiques de l’animal (son poids, son âge, etc.). La pratique a été approuvée par le JAKIM, le premier certificateur Halal au monde, ce qui oriente ce grand débat vers un discours plutôt adapté à la réalité du marché mondial.

Tableau1 : Liste des paramètres pour l’étourdissement électrique

Type de l’animal Courant (Ampère) Durée (Seconde)
Poulet 0,25-0,50 3,00-5,00
Agneau 0,50-0,90 2,00-3,00
Chèvre 0,70-1,00 2,00-3,00
Mouton 0,70-1,20 2,00-3,00
Veau 0,50-1,50 3,00
Boeuf 1,50-2,50 2,00-3,00
Vache 2,00-3,00 2,50-3,50
Tasureau 2,50-3,50 3,00-4,00
Buflle 2,50-3,50 3,00-4,00
Autruche 0,75 10,00

Remarque: le courant et la durée électriques doivent étre validées et déterminées par l’organisation, en tenant compte du type et du poids des autres facteurs variables animaux

Si les musulmans optent actuellement pour cette technique d’abattage par électronarcose, la polémique autour de sa fiabilité reste toujours d’actualité avec les affirmations de certaines organisations (FAWC, MAFF) et chercheurs (Dr Raj, Dr Mouchonière) de référence qui ont démontré l’impossibilité de garantir la nullité des taux de mortalité en utilisant la méthode d’électronarcose, dite Halal, dans les abattoirs.

  • Scandale Halal : Le flou dans la certification et le Halalgate

S’il est en parfaite expansion, le domaine du Halal cache encore plusieurs zones d’ombre qui font couler de l’encre et nourrir les polémiques. Autre que le débat autour de l’abattage rituel et l’électronarcose, la certification Halal est aussi sujet de débats qui a même généré des scandales.

La certification Halal est une démarche qualitative qui sert à vérifier et attester de la conformité d’un produit ou un service aux règles islamiques. Comme les autres domaines, plusieurs sont les sociétés qui certifient ce label en procédant à des audits concernant la production, le conditionnement, la transformation et la distribution du produit en question. Cependant, le professionnalisme fait défaut dans cette sphère où il y a une absence d’une norme internationale qui standardise les procédures et les exigences de la certification Halal. Cet amateurisme s’explique aussi par le manque flagrant des personnes qualifiées pour certifier les produits et services Halal. Ce flou a laissé beaucoup de producteurs frauder les certifications et exploiter le label Halal sans se conformer à une norme, d’autres ont même créé leur propre label pour gagner plus d’argent. La certification Halal fait de plus en plus de polémiques avec la multiplication de ces cas de fraudes et de manipulations des consommateurs musulmans sans qu’ils le sachent. En guise d’illustration, un sondage de l’IFOP datant de 2010 indique que 68% des clients musulmans vivant en France savent très bien qu’on les arnaque en « jouant sur les mots » pour vendre la viande non Halal (les chiffres restent relatifs vu l’interdiction de faire des statistiques ethniques en France). Ceci ne peut qu’alimenter l’ambiguïté chez les musulmans et laisser la place aux scandales.

Des musulmans qui consomment la viande non-Halal sans les informer, des non-musulmans qui consomment le Halal sans le savoir, beaucoup d’irrégularités et de fraudes s’enregistrent annuellement dans les abattoirs qui utilisent le mode d’abattage rituel, etc. En effet, l’industrie Halal n’est pas toute à fait propre et la notion du « Halalgate », définissant les scandales du secteur, se propage de plus en plus dans les médias, notamment ceux qui essayent de limiter l’influence de ce rite de consommation musulmane dans leurs pays.

En France, un épisode de l’émission « Envoyé Spécial », intitulé « Le scandale de la viande Halal », a levé le cap sur une liste de manœuvres malsaines dans les abattoirs Halal et supermarchés français:

  • Le grand nombre d’abattoirs qui refusent l’entrée des caméras et toute déclaration médiatique sans communiquer de raisons valables.
  • Le grand nombre d’abattoirs autorisés par l’État et qui ne respectent pas les pratiques d’hygiène d’où le risque de contamination des consommateurs (la bactérie E.Coli en particulier).
  • Le remplacement de l’abattage par électronarcose, réglementé par l’Union européenne, par un abattage traditionnel selon le rite musulman (sans étourdir la bête) ou par électronarcose Halal sans informer ni les bouchers, ni les consommateurs.
  • L’absence de tout étiquetage qui indique aux consommateurs le mode d’abattage de leur
    viande.

L’enquête diffusée sur France 2 a dévoilé également que 100% de la viande distribuée dans l’Ile-de- France est Halal, mais les consommateurs l’ignorent alors qu’ils préfèrent que ces produits soient étiquetés. Elle a aussi démontré que les abattoirs ont tendance à utiliser l’abattage rituel, alors que les musulmans sont une minorité dans le pays, uniquement pour des fins économiques afin de rentabiliser leurs affaires.

Autre que l’émission « Envoyé Spécial », une autre enquête publiée dans le magazine « Capital » en juin 2016 vient de pointer des doigts trois marques très connues (sans citer les noms) de viande Halal en affirmant que leurs produits contiennent du porc. Cette révélation met en doute la crédibilité de la mosquée d’Evry et du CPH (Conseil et Promotion du Halal) qui sont les certificateurs de ces marques. Pour la mosquée, il ne s’agit pas d’une première. En 2011, elle a été sujet de polémique lorsqu’on a découvert que quatre produits sur cinq de la marque EL Saada contenaient du porc.

En réalité, le débat autour du Halal restera toujours ouvert surtout avec la multiplication des contraintes économiques liées à son expansion. De l’autre côté, l’absence d’une réaction claire des musulmans et la nonchalance des gouvernements dans le traitement de quelques dossiers laissent le chemin libre aux polémiques pour s’agrandir et ralentir le développement de ce secteur.