« N’aimeriez-vous pas que, quand un joueur manque de respect à notre drapeau, les président d’équipe de NFL (la Ligue nationale de football, ndlr) disent : ‘Dégagez moi ce fils de pute du terrain ! Il est viré’ ? » Quand Donald Trump parlait du mouvement de soutien aux Afro-Américains dans le football américain, le ton était menaçant et insultant. Cette déclaration du président américain date de septembre dernier. Et, alors que des joueurs continuent de poser le genou à terre lors de l’hymne national qui précède les rencontres, les autorités sportives du pays tentent d’étouffer le mouvement à coup de pressions. La Nascar avait, le mois dernier, menacé ses pilotes qui rejoindraient le mouvement de protestation de sanctions. Le président américain s’était alors dit « fier » de la fédération de sports automobiles. Mais les menaces de la Nascar n’ont rien de surprenant : selon l’institut Nielsen, 94 % des téléspectateurs qui suivent la Nascar sont blancs, les Noirs ne représentant que 2 % des téléspectateurs. Ce n’est donc pas sur les circuits de la Nascar, ni lors des compétitions de golf ou de hockey sur glace que l’on verra des joueurs poser le genou par terre.

Pas de protestation pendant l’hymne en NBA sous peine de sanction

Mais le football américain, lui, est largement regardé par les Afro-Américains. D’ailleurs, dans le championnat de football américain, près de sept joueurs sur dix sont noirs. Une proportion équivalente de la NBA. Pourtant, après la sortie de Donald Trump, la NBA a tenu à étouffer la protestation dans l’œuf : la ligue professionnelle de basket américain avait elle promis des sanctions en cas de protestation pendant l’hymne national. Le patron de la NBA, Adam Silver, ainsi que son vice-président Mark Tatum ont exhorté les basketteurs américains à rester debout avant les matches. Les présidents de ligues sportives ne veulent pas froisser Donald Trump, et encore moins les sponsors. Si bien que même du côté de la NFL, la mise en place de sanctions contre les protestataires est en train de se mettre en place. C’est le cas chez les Dallas Cowboys, où Jerry Jones, le patron du club, a indiqué dimanche que les footballeurs ne respectant pas le drapeau « ne joueraient pas. » Jerry Jones balaie ainsi d’un revers de la main tout soutien au mouvement de protestation contre les violences faites aux Afro-Américains.

Une journaliste suspendue pour avoir soutenu Colin Kaepernick

Et même à la télévision, l’on tente d’étouffer toute critique du racisme aux Etats-Unis. Jemele Hill, commentatrice sportive sur ESPN, a été suspendue deux semaines pour avoir osé dénoncer les menaces de Jerry Jones. Dans le New York Times, Kashana Cauley dénonce la manipulation faite autour de ce mouvement initié par des sportifs noirs : contrairement à ce qui est dit, rappelle-elle, « les joueurs de la NFL qui refusent de chanter l’hymne ne protestent pas contre le drapeau ou l’hymne, mais ils s’opposent au nombre de personnes noires désarmées brutalisées et tuées par des policiers aux Etats-Unis. » Or, les dirigeants sportifs tentent de faire passer les protestataires pour des traitres à la Nation. En prenant la décision de suspendre sa journaliste, ESPN fait preuve de lâcheté, comme l’écrit Kashana Cauley. Quant à Colin Kaepernick, qui a lancé le mouvement de protestation il y a un an, il est aujourd’hui sans club. Reste à savoir si les pressions du président Donald Trump et des ligues professionnelles suffiront à faire s’essouffler la colère bien légitime des joueurs afro-américains.