Le Conseil d’Etat français a validé l’expulsion de Hassan Iquioussen. Dans le même temps, la CEDH condamnait la France après sa décision d’expulser deux Tchétchènes vers la Russie.
Voilà deux décisions dont le timing est tristement ironique : alors que le Conseil d’Etat validait l’expulsion de Hassan Iquioussen, contre l’avis du tribunal administratif, la France voyait la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) la condamner. Ce mardi 30 août, en effet, Paris a été jugée pour l’expulsion de deux Russes d’origine tchétchène, dont le statut de réfugié avait été révoqué, en Russie.
Selon le jugement rendu par la CEDH, la France a enfreint l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme qui interdit la torture et les traitements inhumains et dégradants. Or, en voulant expulser ces deux hommes, Paris a fait fi des potentiels risques de mauvais traitements qu’ils encourent en Russie.
Selon la CEDH, « la protection offerte par l’article 3 de la Convention présente un caractère absolu. Il ne souffre nulle dérogation, même en cas de danger public menaçant la vie de la nation. Il en est de même y compris dans l’hypothèse, où comme en l’espèce, le requérant a eu des liens avec une organisation terroriste ». Malgré le fait qu’il ait perdu son statut de réfugié, un homme ne peut donc pas être renvoyé dans son pays si cela présente des risques contre sa santé physique.
Deux poids, deux mesures ?
Ce même jour, Gérald Darmanin se félicitait de sa « victoire » devant le juge des référés du Conseil d’Etat, qui donnait son feu vert à l’expulsion de Hassan Iquioussen. L’imam, semble-t-il déjà parti vers la Belgique, doit être expulsé vers le Maroc, qui aurait déjà donné son feu vert.
Une décision qui pose question : au moment où la CEDH interdit à la France les expulsions de deux Tchétchènes, quelle différence y a-t-il avec le cas Iquioussen ?
Pourtant, l’imam, selon les tribunaux, dispose d’attaches « fortes » en France. Mais le Conseil d’État a rejeté les arguments de la défense, estimant que le responsable religieux ne serait pas maltraité au Maroc. Il n’est « pas établi qu’un renvoi au Maroc puisse l’exposer à un risque de traitements inhumains et dégradants », indique le Conseil d’Etat.
Rien d’établi, donc rien de certain. Autrement dit, la France doit expulser au Maroc un imam sur lequel elle a collé l’étiquette de « prédicateur islamiste » qui prône la haine. Nul doute que cela représenterait un risque. Mais le Conseil d’Etat en a décidé autrement. La CEDH sera-t-elle à son tour saisie ?