Dans le Journal du dimanche, Emmanuel Macron a indiqué vouloir « poser les jalons de toute l’organisation de l’Islam de France. » S’il veut engager ce chantier lors du « premier semestre 2018 », le président est resté flou sur ce qu’il fera concrètement. Il a annoncé qu’il continuera « à consulter beaucoup. » « Ma méthode pour progresser sur ce sujet, c’est d’avancer touche par touche, indique le chef de l’Etat. Je ne dévoilerai une proposition que quand le travail sera abouti. »

« Nous sommes assez grands pour prendre notre destin en mains »

Une annonce qui a donné lieu à de nombreuses réactions. Ahmet Ogras, président du CFCM, a indiqué sur le plateau de CNEWS que « la réforme de l’Islam de France n’est pas seulement une ambition du président » et que « c’est avant tout l’ambition des musulmans de France et du CFCM. » Selon lui, « le chef de l’Etat a simplement un rôle de facilitateur dans un pays laïque. » Une façon de dire à Emmanuel Macron de ne pas se mêler d’une réorganisation de l’Islam en France ? « Nous sommes confiants et assez grands pour prendre notre destin en mains. Laissons le temps aux musulmans de débattre en interne », exhorte le patron du Conseil français du culte musulman, qui estime cependant que « l’engagement d’Emmanuel Macron devrait faciliter ce grand saut, même si les grands débats devront se faire en interne, entre les musulmans de France. »

« Tirer des leçons de cet échec qui a fini par désespérer les musulmans de France »

De leur côté, Kamel Kabtane et Azzedine Gaci, respectivement recteurs des mosquées de Lyon et de Villeurbanne, publient un communiqué dans lequel ils écrivent que l’initiative lancée par le président de la République les « réjouit. » Les deux hommes critiquent le CFCM : « Tout le monde se pose des questions sur le rôle de cette instance qui ne peut se prévaloir d’aucune grande réalisation », estiment-ils. Eux veulent « dresser le bilan d’une décennie mouvementée et de tirer des leçons de cet échec qui a fini par désespérer les musulmans de France et les éloigner progressivement de cette structure. » Kamel Kabtane et Azzedine Gaci estiment que « les responsables du CFCM et des CRCM ont laissé s’installer au sein de la communauté musulmane, et en particulier les jeunes, le sentiment selon lequel, ils ne seraient que des gestionnaires intéressés du culte musulman et les ambassadeurs d’intérêts étrangers. »

« Sortir de l’immobilisme »

Pour les recteurs des mosquées de la région lyonnaise, « la structure de représentation des musulmans de France, doit émerger d’eux-mêmes, d’en bas, au niveau départemental. » « Quoi de mieux que le département où les différentes associations cultuelles et culturelles qui se connaissent pourraient travailler ensemble, réfléchir ensemble et avancer ensemble autour de projets communs dans une structure représentative des musulmans du département et échapper ainsi à toute emprise des pays d’origine ? », demandent-ils. Ils en appellent également à la création d’un Conseil théologique des imams qui « leur donnera l’occasion de s’exprimer publiquement et de manière indépendante pour apporter la voix qui manque tant, aux instances représentatives actuelles. » Pour Kamel Kabtane et Azzedine Gaci, il faut « sortir de l’immobilisme » et « faire émerger une représentation fondée non pas sur l’origine nationale mais sur la compétence des individus qui la composent et la qualité des projets qu’ils entendent porter. »