Quatre mois de prison pour « celui qui, publiquement, insulte ou tourne en dérision la doctrine ou le culte d’une communauté religieuse légalement reconnue. » Cet article du Code pénal danois date de plus d’un siècle et demi. Mais depuis ce week-end, le délit de blasphème n’existe plus. En effet, les députés du Danemark ont voté pour sa suppression. Il faut dire que l’article 140 du Code pénal n’était pas vraiment suivi. Même en 2006, lors de l’affaire des caricatures du Prophète, aucune charge n’avait été retenue contre le journal Jyllands-Posten, qui les avait publiées. En réalité, la dernière condamnation pour blasphème au Danemark remonte à 1946. Mais un homme, qui avait publié une vidéo de lui brûlant le Coran, devait être jugé dans deux jours au titre de l’article 140 du Code pénal. C’est ce qui a ravivé le débat.

Le Danemark dans la ligne de mire de Daesh

En effet, la loi sur le blasphème est contraire aux directives de l’Organisation des Nations unies et du Conseil de l’Europe, qui prônent une liberté d’expression totale. Et l’affaire de l’homme brûlant son Coran a relancé les discussions sur le blasphème. Pourtant, il y a deux ans, des experts avait estimé que l’article 140 du Code pénal danois « n’empêchait pas la critique sévère des religions et des dogmes religieux » et qu’il était simplement « une garantie contre les autodafés, par exemple, du Coran et de la Bible. » La fin du délit de blasphème place en tout cas le Danemark comme un cible privilégiée de Daesh : les services locaux de renseignement estiment que la suppression de l’article 140 du Code pénal pourrait avoir comme conséquence d’« augmenter les menaces contre le Danemark et les intérêts danois à l’étranger », mais également de « créer une attention négative à l’égard du Danemark. » Si, du côté des députés, certains se félicitent de la fin du délit de blasphème, certains, comme les sociaux-démocrates, assurent avoir « du mal à voir en quoi nous obtenons une démocratie plus forte, une unité et un meilleur débat démocratique en autorisant à brûler les écrits saints. »