Est-ce une vision de la laïcité à deux vitesses ? Le gouvernement québécois, dirigé par la Coalition avenir Québec, a décidé de légiférer sur les signes religieux dans les palais de justice de la province canadienne. Selon le Huffington Post, les juges n’auront plus le droit d’arborer de signe religieux. Exit donc les croix autour du cou des hommes de loi, explique ainsi au journal électronique la députée Sonia LeBel, qui indique que cette règle s’appliquera à tous les employés de l’Etat en situation d’autorité coercitive. Juges, mais aussi gardiens de prison, policiers mais aussi enseignants seront donc concernés.

Mais cette loi n’interdira pas, ajoute la députée, la présence d’un crucifix à l’Assemblée nationale, ni dans les palais de justice. En résumé, les juges ont donc interdiction de porter une croix mais trôneront… sous un crucifix. La raison de ce deux poids-deux mesures ? La crucifix de l’Assemblée nationale ferait « partie de l’histoire du Québec », et il est donc « normal » qu’il continue à y trôner bien que sa présence date en réalité de 1936, soit quatre siècles après le début de l’histoire du Québec.

Selon le député de Beauce-Sud, Samuel Poulin, « il suffit de se promener un peu partout au Québec et les gens sont attachés, non pas seulement par religion, mais sont attachés à notre histoire. » La députée de la majorité estime, elle, que les deux décisions — celle d’interdire le port de signes religieux mais d’autoriser le crucifix — ne sont pas incompatibles. « On va marquer de façon claire le fait que le Québec est une société laïque », assure-t-elle, tout en nuançant : « Il ne faut pas tourner le dos à notre passé. »

Pourtant, une commission, dans un rapport rendu récemment, recommandait la suppression du crucifix, au moins à l’Assemblée nationale. Ou en tout cas son déplacement dans un autre endroit qui aurait permis de « mettre en valeur sa signification patrimoniale. » La députée explique d’ailleurs clairement que l’histoire catholique permettra d’éviter à l’Islam de s’imposer au fil des années : « Notre histoire, qu’on le veuille ou non, est fondée sur la religion catholique. Les symboles religieux sont là parce qu’ils sont des symboles de notre histoire. On n’a pas de passé musulman. »