Le gouvernement birman ne pouvait plus ignorer les multiples accusations de persécution de la minorité Rohingya dont il est la cible depuis plusieurs mois. Encore moins quand lesdites accusations émanent de l’Organisation des Nations Unies (ONU). Soit. Tout en refusant l’accès de leur territoire aux représentants onusiens, les autorités birmanes ont donc décidé de constituer une commission d’enquête nationale pour investiguer les cas de violence dans l’Etat Rakhine, au nord-ouest du pays, qui abrite la communauté musulmane Rohingya. Une vague de représailles aveugles avait été déclenchée en octobre 2016, suite à l’attaque supposée de postes de police frontaliers birmans par des membres de la minorité religieuse. Résultat de ce déferlement de violences : plus de 70 000 Rohingya ont fui leur foyer et leur région pour se réfugier au Bangladesh voisin. Non seulement intense, l’offensive des autorités birmanes s’est prolongée plusieurs mois, ce qui a obligé les Nations Unies à sortir de leur léthargie pour dénoncer, sur la base d’un rapport publié en février dernier, un possible « nettoyage ethnique » et, « très probablement », des crimes contre l’Humanité. Il y a quelques jours par exemple, un père rohingya et ses deux fils auraient été brutalement battus et décapités par des extrémistes bouddhistes dans la commune de Rathedaung.
#Burma – A Rohingya Muslim father and his two sons were brutally beaten and decapitated by Buddhist extremists in Rathedaung. pic.twitter.com/emmctq4mm4
— DOAM (@doamuslims) August 4, 2017
Tout au plus des « actions excessives »
Face à ces accusations officielles, le gouvernement dirigé par la Prix Nobel 1991 Aung San Suu Kyi a néanmoins opposé une fin de non-recevoir à la proposition de l’ONU d’envoyer une mission d’enquête sur les abus endurés par les Rohingya. En lieu et place, l’Etat birman a formé sa propre commission interne. Logiquement imparable… Et les conclusions de cette commission ont donc été diffusés ce dimanche. Sans surprise, les auteurs affirment n’avoir rencontré aucune preuve selon laquelle les forces de sécurité se seraient rendus coupables d’une campagne systématique de violences, d’assassinats et d’incendies volontaires. Seule concession ayant filtré dudit rapport : de possibles « actions excessives » qui auraient pu être menées par des membres des forces armées « de rang subalterne »… Mais « des incidents [violents] paraissent avoir été inventés (…) et d’autres ne renferment que peu de preuves pour être vérifiés », conclut le rapport. Aucune mention n’a donc été faite des cas systématiques de torture, de viols, d’incendies de maisons, de meurtres collectifs qui ont frappé cette minorité traditionnellement méprisée par la majorité bouddhiste. Selon la commission nationale, « aucun acte de ce genre n’a été découvert », les conclusions de l’ONU se caractérisant en outre, selon les Birmans, par un « manque d’équilibre » et par « l’ignorance des attaques de militants Rohingya ».