A la veille de son entrée en fonction à la présidence du Conseil français du culte musulman (CFCM), nous avons parlé avec Ahmet Ogras. A la faveur d’une présidence tournante, le Franco-Turc remplace Anouar Kbibech à la tête d’une organisation critiquée. Le nouvel homme fort de l’« Islam de France » répond à nos questions.

LeMuslimPost : Vous prenez vos fonctions le 1er juillet à la tête du CFCM. Quel est votre programme pour cette organisation ?

Ahmet Ogras : Je veux professionnaliser le CFCM. Aujourd’hui, nous avons un demi-poste de permanent. Ma première mission va être de proposer un vrai budget et de le faire adopter. Le CFCM doit aujourd’hui être renforcé et tout le monde doit y trouver son compte. Il y a de nombreux sujets à traiter : l’imamat, le halal ou la lutte contre l’idéologie de Daesh. Ces dossiers doivent être traités par des chargés de mission et pas par un seul demi-permanent.

Votre arrivée, notamment parce que vous êtes le représentant de la Turquie, a fait polémique. Que répondez-vous à vos détracteurs ?

Je ne suis pas le représentant de la Turquie mais le président du Comité de coordination des musulmans turcs de France. Cela fait quatre ans que le CFCM a initié la présidence tournante et ça n’a jamais choqué qui que ce soit. Pourquoi de telles craintes ? Je n’ai rien à cacher : notre fédération existe depuis plusieurs décennies et elle a fait ses preuves.

« Aujourd’hui, le CFCM n’a pas de légitimité »

Vous avez rencontré Emmanuel Macron lors d’un iftar avec le CFCM. Que vous êtes-vous dit ?

Qu’il fallait renforcer le CFCM, qu’il y a un manque de moyens financiers. Emmanuel Macron a fait un très bon discours devant le CFCM. Nous avons fait le même constat : aujourd’hui, le CFCM n’a pas de légitimité et la légitimité passe par la base, c’est-à-dire par les mosquées.

Comment améliorer la représentativité du CFCM ?

Je veux aujourd’hui des mosquées membres des conseils régionaux du culte musulman (CRCM). Il faut créer une relation entre les lieux de culte et l’institution. On ne peut pas continuer à perdre du terrain alors que nous sommes le deuxième culte en France. Le CFCM doit appartenir à tous les musulmans. Laissez-nous juste le temps, le CFCM est un adolescent de 15 ans.

Le CFCM a été décrié lors de la campagne présidentielle alors que les dirigeants comptent beaucoup sur la Fondation de l’Islam de France. Avez-vous peur que cette dernière vous fasse de l’ombre ?

La Fondation de l’Islam de France est une association culturelle, là où nous sommes une organisation cultuelle. Bien sûr, nous sommes preneurs de ce que la fondation a à nous donner, mais elle n’a aucune légitimité sur l’aspect cultuel.

« Il ne faut pas toucher au CFCM, il faut le renforcer »

Allez-vous réformer le CFCM, revenir sur la présidence tournante ou encore changer le système de vote des délégués élus aux Conseils régionaux du culte musulman dont le nombre est calculé en fonction de la surface des lieux de culte ?

Non, il ne faut pas toucher au CFCM. Il faut au contraire le renforcer, ainsi que les CRCM.

Comment comptez-vous trouver des financements plus importants ?

Déjà, je pense que les fédérations doivent revoir leur participation à la hausse. Pour le reste, le débat est ouvert.